Jouer, apprendre, s’épanouir en nature
Entretien avec Delphine Pinson, pédagogue en milieu naturel
Propos recueillis le 14 avril 2021
En tant qu’ancienne professeure des écoles, j’ai toujours milité pour que l’école publique soit plus vivante, plus innovante. Aujourd’hui, je continue à militer pour cela en accompagnant l’école du dehors, dans l’école publique.
Mais il y a un constat qui est là : il y a des enfants qui ne trouvent vraiment pas leur place à l’école. J’irai même plus loin : il y a des enfants pour qui l’école est profondément destructrice. Ils font face à leur difficulté à rentrer dans le cadre, et voient jour après jour, leur confiance dégringoler.
Pour moi, c’est dramatique.
Un lieu de pleine nature pour les enfants Extraordinaires
Delphine Pinson a toujours été animatrice : de colonies de vacances, de centre de loisirs, dans des fermes pédagogiques, au sein de structures d’éducation à l’environnement et scientifiques, comme l’association Les Petits Débrouillards.
Pendant 10 ans, elle a également été professeure des écoles pour tous les niveaux, de la maternelle au CM2 et aussi en IME, Institut Médico-Éducatif.
En 2016, elle réalise un film documentaire : » C’est d’apprendre qui est sacré « , auprès de la classe de Michel Duckit, enseignant militant pratiquant une pédagogie inspirée de Célestin Freinet, dans laquelle les apprentissages émergent directement du vivant.
C’est forte de son expérience qu’en 2018, Delphine crée l’association Natures Extraordinaires, avec l’envie de proposer des accueils en forêt pour les enfants atypiques, les enfants extra-ordinaires, ceux pour qui l’école ou les loisirs traditionnels ne sont pas adaptés ou insuffisants.
Un lieu est trouvé à Lespinassière. Il s’agit du site d’une ancienne châtaigneraie, non exploitée et peu entretenue depuis plusieurs années. Avec l’aide d’une équipe de bénévoles, Delphine aménage le site, développe le projet pédagogique, démarche les structures.
Les activités démarrent à l’été 2018. Depuis l’association a accueilli plus d’une centaine d’enfants de la région sur le site de la châtaigneraie, pour une heure ou quelques jours, dans le cadre de ses ateliers, stages et séjours.
L’expérience du dehors et le risque mesuré
Le projet pédagogique de Natures Extraordinaires s’inspire des modèles d’école de la forêt développés partout en Europe : en Allemagne (Waldkindergarten), en Angleterre (Forest School) ou encore aux États-Unis. L’association est membre membre du RPPN ( Réseau de Pédagogie Par la Nature). Elle est aussi impliquée dans la dynamique » Sortir » du Réseau École et Nature.
Les activités proposées mettent en avant les principes du jeu libre, du risque mesuré et de la régularité.
Oser le risque mesuré, c’est permettre à l’enfant de rentrer dans une zone de « risques », et lui donner tous les moyens, pour ne pas qu’il se mette en danger. Le but est d’amener l’enfant dans une posture responsable, de prendre confiance en lui, en ses capacités. Les activités proposées lui permettent d’être dans un temps de concentration, lorsqu’il utilise un outil par exemple.
Par tous les temps !
Il n’y a pas de mauvais temps, il n’y a que des mauvais vêtements.
Chez natures extraordinaires, on ne s’arrête pas quand il pleut. Les activités proposées ont pour objectif de permettre aux enfants de renouer avec le vivant : c’est une approche centrée sur les sens et sur l’immersion.
Le lieu est aménagé pour accueillir les enfants en pleine nature, en toute sécurité et par tous les temps ! Plusieurs structures en bois et toile ont été construites : un fort, un dôme, un tipi…
On expérimente l’humidité de la pluie et la chaleur du feu de bois. On crée des souvenirs intenses qui n’ont pas de prix au niveau sensoriel.
L’important dans cette approche, c’est la régularité. En créant en lien affectif et régulier avec le lieu, l’enfant peut plus naturellement manifester son amour de la nature, sa compréhension des enjeux mais aussi son envie de protéger le vivant.
L’école du dehors
Le projet pédagogique n’a cessé de se diversifier et de toucher de nouveaux publics : des familles mais aussi des écoles, des centres de loisirs, des institutions…
En parrallèle de ses accueils sur site, l’association Natures Extraordinaires développe un programme d’accompagnement d’école du dehors, pour les enseignants qui ont envie de sortir davantage avec leur élèves.
Des chercheurs ont mis en évidence les bénéfices des temps de « classe dehors » notamment pour l’acquisition du langage, la construction de la pensée logico-mathématique et la motivation que l’on sait être le levier essentiel à tout apprentissage.
Chez nos voisins proches, l’école dehors est inscrite dans les habitudes. En Suisse, en Allemagne, en Ecosse, au Danemark ou encore en Suède, certaines écoles se déroulent pleinement en forêt et cela par tous les temps.
En France, ces pratiques se développent également. Dans l’académie de Poitiers, une centaine d’écoles sortent en forêt au moins une demi-journée par semaine. Encouragée par un contexte sanitaire qui bannit les espaces clos, l’école du dehors est en plein essor.
Une châtaigneraie vivante
En parallèle du projet éducatif, Natures Extraordinaires porte le projet de réhabilitation et de valorisation de la châtaigneraie. Le terrain a été initialement confié à l’association dans le but de l’entretenir et d’en restaurer la fonction nourricière traditionnelle.
Un travail d’éclaircissement a permis d’ouvrir l’espace et de redonner lumière et vitalité aux arbres greffés. A l’automne, les fruits sont récoltés au filet et la récolte est transformée à l’atelier de transformation de Castans. La crème de marrons est ensuite vendue localement (circuit cours) au profit de l’association.
Et maintenant ?
Aujourd’hui, Natures Extraordinaires souhaite recentrer le projet pédagogique autour de l’accompagnement des enfants atypiques, construire avec les écoles, les structures, les familles, des parcours personnalisés et adaptés à chaque enfant, dans le respect de ses besoins et de ses envies. L’association cherche un nouveau terrain, plus grand, plus adapté à ce projet.
L’association grandit grâce au bouche à oreille et à la mobilisation d’une équipe de bénévoles et de pédagogues engagés. Cependant, le nombre de bénéficiaires est encore assez limité.
La question de la pérennité du projet se pose.
Il manque toujours du temps. C’est infini ce qu’on peut faire avec ce support, en terme de partenariats, d’outils, d’aménagements, de propositions.
La difficulté principale en ce moment, quoi qu’on s’en sorte plutôt bien, c’est évidemment la crise sanitaire. On s’en sort bien parce qu’on propose des activités en plein air, donc beaucoup moins exposées. C’est exactement ce dont on a besoin en ce moment. Pour autant, l’association est obligée de suspendre de manière assez chronique ses activités et ce n’est pas forcément facile de se projeter dans le futur.
Comment les aider ?
L’association bénéficie d’une communauté de soutiens et de bénévoles pro-active, mais il manque parfois quelques coups de main, pour des chantiers d’élagage, de bricolage.
Pour toute information ou proposition, contactez Delphine :
Téléphone : 06 71 40 38 35
www.naturesextraordinaires.com
Vous pouvez aussi faire un don à l’association en suivant ce lien :
https://www.helloasso.com/associations/amneo/formulaires/1
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